La réforme de la formation professionnelle continue
Publié le 25 octobre 2019
La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, adoptée le 5 septembre 2018, réforme en profondeur le système de formation professionnelle et d’apprentissage. L’entrée en vigueur de ses dispositions s’échelonne sur 2019 et 2020, voire 2021. Les principaux changements sont les suivants.
Financement de la formation professionnelle et de la taxe d’apprentissage
1 – Les contribution des entreprises
Une contribution unique à la formation professionnelle et à l’alternance remplace :
- La contribution au financement de la formation professionnelle : 0,55 % ou 1 % de la masse salariale annuelle brute, selon que l’effectif de 11 salariés est atteint ou non et sous réserve de taux différents prévus par les secteurs professionnels (par exemple, dans la branche du spectacle vivant, il est de 1,30%)
- La taxe d’apprentissage : 0,68 % de la masse salariale
Ces contributions sont désormais calculées sur les rémunérations de l’année en cours, avec une « année blanche » pour la taxe d’apprentissage en 2019.
S’y ajoute une contribution de 1% destinée à financer le Compte Personnel de Formation (CPF) des salariés en CDD, ainsi que la Contribution Supplémentaire à l’Apprentissage (CSA) pour les entreprises de 250 salariés et plus qui n’emploient pas au moins 5% d’alternants.
2 – Les organismes collecteurs et financeurs
Les Organismes Paritaires Collecteurs Agréés (OPCA) évoluent pour devenir des Opérateurs de Compétences (OPCO). Chaque branche professionnelle désigne l’OPCO auquel elle souhaite être rattachée, selon des critères d’enjeux communs de compétences.
Concrètement, les OPCO ne collecteront plus les cotisations de formation à l’horizon 2021 ; elles seront collectées par les Urssaf. Les OPCO auront un rôle de conseiller en formation professionnelle.
Consulter la liste des OPCO sur le site du Ministère du travail
Notamment, on constatera que l’Afdas est maintenue comme organisme désigné dans les branches du spectacle, de l’audiovisuel et des industries culturelles, que pour la branche Animation, le nouvel OPCO est celui de la Cohésion sociale, et que pour les entreprises de l’ingénierie et du conseil, le Fafiec devient Atlas.
Par ailleurs, une nouvelle instance nationale de régulation, intitulée France Compétences, est créée. Sa vocation consiste à :
- Assurer la répartition de la contribution unique à la formation professionnelle et à l’alternance entre les différents financeurs
- Réguler la qualité de l’offre de formation pour l’accès aux financements publics et paritaires
- Actualiser le Répertoire National des Certifications Professionnelles (RNCP) et créer le Répertoire Spécifique des Certifications et Habilitations (RSCH, ex-Inventaire)
- Évaluer les politiques de formation et apprentissage
- Sélectionner les opérateurs régionaux du Conseiller en Evolution Professionnelle (CEP)
Autrement dit, France Compétence va œuvrer à coordonner la politique de formation professionnelle et co-instruire (à une échelle plus macroscopique) avec les OPCO les dispositifs de formation. Les budgets seront attribués aux entreprises par les OPCO sous contrôle de France Compétence.
3 – Les prestataires de formation
A compter du 1er janvier 2021, tous les organismes réalisant des actions de formation et d’apprentissage, des prestations de bilans de compétences ou d’accompagnement à la Validation des Acquis de l’Expérience (VAE) devront être certifiés par un organisme indépendant pour accéder aux financements publics ou mutualisés.
Organisation de la formation professionnelle
1 – Les formations en alternance
Les contrats de professionnalisation et les contrats d’apprentissage font l’objet d’un rapprochement pour ce qui est de leur régime juridique, des règles de mise en oeuvre et des modalités de financement : durée minimale du contrat d’apprentissage fixée à 6 mois au lieu d’un an, entrée en apprentissage repoussée à 29 ans, embauches possibles tout au long de l’année…
A compter du 1er janvier 2020, l’enregistrement et le financement des contrats d’apprentissage sont confiés aux OPCO, déjà en charge des contrats de professionnalisation.
Enfin, la période de professionnalisation laisse place à un nouveau dispositif de reconversion ou promotion par alternance appelé « Pro-A », ouvert aux salariés en CDI et CUI-CDI dont le niveau de qualification est inférieur ou égal à la licence, visant l’acquisition d’un diplôme, d’un titre, d’un CQP ou d’une qualification professionnelle reconnue par une Convention collective.
2 – Le Compte personnel de formation
Successeur du Droit Individuel à la Formation (DIF), le Compte personnel de formation (CPF) est un droit à formation, individuel, exprimé en heures, acquis à proportion des heures travaillées dans l’année. Depuis 2015, le nombre d’heures acquises par un salarié à temps complet est de 24 heures par année travaillée (contre 20h/an pour les heures DIF).
A compter de 2020, le CPF sera converti en euros. Les heures inscrites sur le CPF sont ainsi monétisées à un taux unitaire de 15 €. A partir de 2020, tout salarié (à l’exception de ceux travaillant moins d’un mi-temps) verra son compte crédité de 500 € par an, dans la limite de 5000 €. Les salariés faiblement qualifiés bénéficieront d’un droit majoré de 800 € par an, plafonné à 8000 €.
Le dispositif pourra être utilisé pour obtenir :
- Des certifications inscrites au Répertoire National des Certifications Professionnelles (RNCP)
- Des certifications et habilitations inscrites dans un Répertoire Spécifique des Certifications et Habilitations (RSCH) qui remplacera l’Inventaire de la CNCP (Commission nationale de la certification professionnelle)
Le CPF reste mobilisable pour réaliser un bilan de compétences ou une action de Validation des acquis de l’expérience, préparer le permis B (et désormais le permis poids lourd – C), se former en vue d’une création ou reprise d’entreprise ou à l’exercice de missions de bénévolat ou de volontariat.
Un CPF de transition professionnelle se substitue au Congé individuel de formation (CIF et CIF CDD), pour des formations longues liées, par exemple, à des reconversions professionnelles.
3 – Le nouveau Plan de développement des Compétences
Le plan de formation a laissé place au 1er janvier 2019 au Plan de développement des compétences.
Y sont distinguées :
- Les formations obligatoires ou nécessaires au maintien sur le poste. Ce sont des actions de formation qui conditionnent l’exercice d’une activité ou d’une fonction, en application d’une convention internationale ou de dispositions légales et réglementaires. Elles sont organisées sur le temps travail avec maintien de la rémunération.
- Les autres formations sont normalement réalisées sur le temps de travail et sont rémunérées. Elles peuvent être réalisées en tout ou partie en dehors du temps de travail dans certaines conditions : maximum 30 heures par an et par salarié (ou 2% du forfait annuel en heures ou jours), hors accord d’entreprise ou de branche fixant une autre limite.
NB : Le financement des actions de formation par les OPCO dans le cadre du nouveau Plan est désormais réservé aux seules entreprises de moins de 50 salariés. Auparavant, les OPCA pouvaient financer les actions dans le cadre du Plan de formation pour les entreprises de -300 salariés. Le financement de l’OPCO est variable et plafonné selon le secteur d’activité et l’effectif de l’entreprise. Dans la limite d’un budget global, il prend en charge tout ou partie des coûts pédagogiques mais intervient également sur les salaires versés et les frais annexes.
NB2 : Lorsque les temps de formation sont réalisés hors temps de travail, l’allocation de formation de 50% du salaire net habituel est supprimée. Le salarié peut refuser de participer à ces actions de formation hors temps de travail.
4 – L’entretien professionnel
Issu de la Loi du 5 mars 2014, puis de la Loi du 5 septembre 2018, l’entretien professionnel est l’un des points clé de l’organisation de la formation professionnelle, au niveau individuel. Cet entretien, qui est à distinguer de l’entretien annuel d’évaluation, est axé sur l’évolution professionnelle du salarié, et le maintien de son employabilité – à travers un parcours de formation personnel.
L’entretien professionnel doit être réalisé à l’embauche du salarié, puis au moins tous les 2 ans. Il formalise par écrit l’évolution du salarié dans son poste, de sa rémunération, note les formations suivies, certifiées, la validation de l’expérience professionnelle. Tous les 6 ans au moins, il est effectué un « état des lieux récapitulatif du parcours professionnel” qui dresse le bilan de ces entretiens. Il doit montrer que 2 critères parmi les 3 suivants au moins sont remplies :
Avoir suivi au moins une action de formation
Avoir acquis des éléments de certification par la formation ou par la validation des acquis de l’expérience
Avoir bénéficié d’une progression salariale ou professionnelle.
Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, si au moins deux de ces critères n’ont pas été remplis, le CPF des salariés concernés devra être abondé par l’employeur à hauteur de 3000 €.
NB : Les conditions de mise en œuvre de l’entretien professionnel peuvent désormais être adaptées par voie d’accord d’entreprise ou de branche.
En résumé, si la réforme de la formation retire aux OPCA la compétence de collecte et de gestion directe des cotisations, ceux-ci restent les interlocuteurs privilégiés des petites et très petites entreprises pour la constitution et le financement des projets de formation de l’entreprise, comme des salariés. Les nouveaux dispositifs favorisent les petites entreprises (moins de 50 salariés) qui restent bénéficiaires de l’ex Plan de formation (nouveau Plan de développement des compétences), tandis que les obligations augmentent autour du formalisme de la gestion de la vie professionnelle du salarié.
Cet article a été rédigé en partenariat avec Daniel JARNET www.dj-formation.webnode.fr